Le changement climatique affecte les seniors.
Il les affecte dans leurs corps et dans leur santé, puisque, comme on le sait, les seniors ont plus de mal à réguler leur température corporelle et sont plus à risque de développer des maladies liées à la chaleur. Mais le changement climatique peut aussi les affecter sur un plan plus émotionnel et réveiller leur envie de s’engager pour la cause climatique, à l’instar des « Grands-Parents pour le climat » ou des « Aînées pour la protection du climat ».
Les deux derniers « Jeudis de la FAAG » – espace d’échanges qu’organise la Fondation pour la formation des aînées et des aînés de Genève depuis de nombreuses années – ont abordé ces deux dimensions. Face aux bouleversements climatiques : comment peut-on agir pour faire face aux risques, ou pour faire bouger les lignes ? Retour sur ces deux après-midis de rencontre.
Problèmes de thermorégulation liés à l’âge : comment faire face ?
C’est autour de cette question que s’est déroulée la première rencontre de la FAAG dédiée à la question du climat, le jeudi 1er juin.
Comme nous l’a appris le Prof. François Hermann des HUG – premier intervenant de l’après-midi –, la thermorégulation est la fonction de l’organisme qui assure que le corps reste à température constante. Indispensable au bon fonctionnement du métabolisme, cette fonction s’altère toutefois avec l’avancée en âge. Les personnes âgées sont donc plus à risque de souffrir des effets de la chaleur (mais aussi du froid). Pour faire face à cela, les bons gestes à adopter durant l’été sont :
Mais on ne peut pas compter uniquement sur des mesures comportementales pour s’adapter aux épisodes caniculaires de plus en plus fréquents. Il faut agir à d’autres niveaux, plus structurels, pour offrir des réseaux de soutien aux aîné·es et remédier à la fournaise en ville. C’est ce qui a été évoqué dans la seconde présentation, donnée par Véronique Delley de la Direction générale de la Santé du canton de Genève et Pierre Orelli, délégué senior de la ville de Carouge.
Comme l’a évoqué Véronique Delley, l’isolement social dont souffrent les aîné·es devient un problème encore plus préoccupant lors des canicules. Face à cela, le Canton a, par exemple, mis en place la campagne « pendant la canicule, pense à tes proches », de courtes capsules vidéo visant à stimuler la solidarité des jeunes générations envers les aîné·es. En période d’alerte canicule de niveau 4, le Service des affaires sociales de la Ville de Carouge s’occupe, quant à lui, de contacter les aîné·es vulnérables pour s’assurer qu’ils et elles restent en bonne santé. La ville de Carouge met également à disposition des seniors une salle climatisée.
Du point de vue de la lutte contre la chaleur, le Canton est aussi à la base du projet « De parc en parc » qui offre des îlots de fraîcheur sur le chemin de plusieurs parcs genevois (voir image ci-dessus); il publie également une carte interactive des fontaines et points d’eau à Genève. Si ces initiatives sont louables, il reste énormément à faire dans le canton de Genève pour abaisser les températures. Plusieurs personnes du public (dont la représentante du Bureau Romand de l’ATE)) ont d’ailleurs pris la parole pour revendiquer un plus grand courage politique face à cette problématique ! Rappelons que c’est aussi ce que demande le texte de l’initiative « climat urbain » déposée en août 2021, à savoir que chaque année pendant 10 ans, 1% des surfaces dédiées au trafic motorisé soit transformé en espaces verts et en voies de mobilité durable (marche, vélo, transports publics). Des initiatives similaires ont été déposées ces dernières années dans d’autres villes suisses… Espérons que les choses s’accélèrent de ce côté-là.
Bouleversement climatique : que pouvons-nous faire ?
La deuxième rencontre autour du thème du réchauffement climatique, le jeudi 15 juin, a donné la parole à deux seniors engagées dans la lutte contre le dérèglement climatique : Anne Mahrer, co-présidente des Aînées pour la protection du climat, puis Jacqueline Lecocq, Présidente des Grands-parents pour le climat-Genève. Deux récits inspirants qui montrent qu’il n’y a pas d’âge pour s’engager !
Anne Mahrer a présenté le long chemin parcouru par l’association les Aînées pour la protection du climat pour faire valoir les droits des personnes âgées face au réchauffement climatique. Un chemin qui les a menées jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme et dont l’issue (on espère positive !) devrait être connue d’ici la fin de l’année.
Anne Mahrer est revenue sur la constitution de l’association : inspiré·es par la condamnation de l’État néerlandais pour inaction climatique, un petit groupe d’activistes se demande comment porter une lutte similaire et mettre le gouvernement suisse face à ses responsabilités. Pour cela, il faut constituer ce que les Américains appellent une « class action », un recours collectif incarné par des personnes particulièrement vulnérables face au réchauffement climatique. Ces personnes sont toutes trouvées : la cause sera portée par des femmes âgées, dont la santé et la vie sont particulièrement menacées lors des canicules. S’ensuit une longue action judiciaire, pavée des refus successifs du gouvernement et de la justice suisses d’entrer en matière. Qu’à cela ne tienne ! Les Aînées pour la protection du climat se rendent à la Cour européenne des droits de l’homme pour déposer leur action contre le gouvernement suisse. La Cour leur répond vite et déclare leur requête prioritaire. Le 29 mars 2023 a lieu l’audience publique devant 17 juges, 5 avocats de chaque côté, et une foule de médias du monde entier. La décision finale de la Cour devrait arriver en fin d’année 2023… On a hâte de connaître le dénouement de ce beau combat. Un dénouement qu’on espère en faveur des activistes et du climat.
La deuxième intervenante était Jacqueline Lecocq, qui nous a présenté les actions que mène la branche genevoise des Grands-parents pour le climat. A la base de cette association, le sentiment de plusieurs ainé·es de porter une responsabilité vis-à-vis des générations futures. L’association prône donc la sobriété : « vivre avec moins, pour que les autres puissent vivre au moins ». Elle est active à plusieurs niveaux : elle organise des événements, dont une grande conférence annuelle avec une université, et mène divers projets de sensibilisation sur l’alimentation, le « jour du dépassement », ou le numérique éthique. L’association anime des ateliers didactiques et tient des stands dans différentes manifestations. Elle sera présente au prochain festival Alternatiba. N’hésitez pas à passer les voir et, qui sait… à vous engager vous aussi ?